Cela fait déjà près de 20 ans (et oui déjà) que j’ai commencé à écrire des chroniques diverses et variées, de façon amateur et professionnel.
Et depuis tout ce temps, je me suis toujours refusé à mettre une note maximale au moindre de mes tests, estiment que nul ne mérite une note parfaite.
Mais le temps passe et il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis…
Et voilà qu’après une très belle année au sein de Winkco, je brave ce précepte avec Streets of Rage 4.
Oui, après moult réflexions, j’attribue un 5/5 au titre de Dotemu. Je n’aurais jamais pensé en arriver là mais que voulez vous, le monde est pavé de surprises.
Alors installez vous avec un bon café (ou toute autre boisson) et voyons ensemble le pourquoi du comment si vous le voulez bien !
Le made in France, c’est vachement bien… (© Gérard Depardieu)
Et oui messieurs dames, nous avons là un pur produit français. Alors avant toute chose, attardons-nous sur ce petit studio Parisien.
Fondé en 2007 par Xavier Liard et Romain Tisserand, le studio a alors pour objectif de porter d’anciens titres devenus obsolètes pour les supports modernes. Usant de différentes techniques d’émulation ou même de code source lorsque cela leur est possible, la jeune équipe se fait rapidement remarquer par la scène indé et autres amateurs de retrogaming.
Les années passent, les projets s’enchaînent, jusqu’en 2017 où, avec Wonder Boy: The Dragon’s Trap, l’équipe sortira définitivement de l’ombre.
Offrant un remake d’une beauté incroyable tout en restant fidèlement proche de l’original comme jamais (une pression d’une simple touche permet de basculer instantanément sur l’affichage d’origine pour vous dire !). Un titre que je ne saurais que trop vous recommander.
Faisant preuve d’un respect incroyable du matériau d’origine tout en proposant un produit fini d’une qualité exemplaire, le studio fera les gros titres.
Et voilà qu’aujourd’hui, épaulé par Lizardcube (studio Parisien également, ayant participé à Wonder Boy: The Dragon’s Trap) et par Guard Crush Games (studio Québécois responsable de Streets of Fury), Dotemu nous livre la suite d’une licence culte en sommeil depuis 26 ans avec Streets of Rage 4.
Un héritage, une autre époque, un autre monde
Pour les plus jeunes d’entre nos lectrices et lecteurs, le concept de borne d’arcade ne représente qu’un énorme meuble présent chez cet oncle aficionados de retrogaming.
Mais pour toute une génération de joueur, cela nous renvoie à des salles enfumées, mal éclairées, bruyantes où nous allions dépenser toute la monnaie possible et inimaginable pour des sessions de jeu aussi courtes qu’intenses.
Genre maître des années 80, le jeu d’arcade s’est rapidement exporté sur consoles de salon dans des formats plus ou moins réussi. Et le titre qui nous intéresse aujourd’hui est issu d’une saga qui a régné en maître (et règne encore ?) dans le domaine du beat-them-all – un type de jeu où vous avancez sur un chemin prédéfini avec une succession d’ennemis à défaire. Avançant au fil des niveaux tout en surveillant votre nombre de vies, car si ce dernier tombe à zéro, c’est le game over, retour à la case départ !
Si les déclinaisons du genre ont été nombreuses, il a fini par s’éteindre avec l’avènement des consoles de salon. Le genre se prêtant à des sessions courtes mais endiablées, il fut rapidement supplanté par un modèle supprimant le concept de multi-joueurs au profit de l’approfondissement d’autres éléments tels que des composantes RPG ou d’aventure.
Nous avons ainsi vu émerger des sagas comme les Devil May Cry ou les premiers God of War pour ne citer qu’eux.
Mais voilà, refusant de laisser mourir un héritage, Dotemu s’est donné pour mission de donner une suite à Streets of Rage 3, près de 26 ans plus tard. Faisant fit des canons actuels, c’est avec un amour inconditionnel et immodéré que les petits français, après avoir bravé vents et marées pour obtenir les droits d’exploitation, nous livrent aujourd’hui un opus touchant au divin.
Enfile tes chaussures, prend ton GuettoBlaster, on va nettoyer les rues !
Des années se sont écoulées depuis que vous avez défait l’organisation de Mr X, cruel baron du crime. Mais voilà que surgissent aujourd’hui ses enfants, les jumeaux Y – près à tout pour faire main basse sur l’héritage criminel de leur défunt père.
Ne pouvant rester sans régir, Axel et Blaze, les héros du premier opus, accompagnés de deux petits nouveaux répondant aux noms de Cherry et Floyd se décident à faire front commun pour mettre fin aux agissements criminels et rendre leurs rues à nouveaux fréquentables.
Vous l’aurez compris, le pitch reste cliché au maximum, épargnant toute complexité au profit d’une action immédiate. Mieux, l’univers se joue des codes des classiques du genre pour encore mieux se les approprier.
Vous aurez donc pour objectif, aussi simple soit-il, de nettoyer les niveaux les uns après les autres de tous les malfrats à portée de poings !
Prend ton pad, ton stick arcade ou ce que tu voudras, mais prépare toi à cogner !
La composante principale, ce qui fait l’essence de ce genre de titre est avant tout sa jouabilité
Ici, point de fioritures. Vous aurez une touche de saut, une d’attaque, une pour l’attaque spéciale (qui consomme une partie de votre précieuse barre de vie) et c’est à peu près tout.
À vous de découvrir les combos, les méthodes de choppe, les méthodes d’esquives… le jeu ne vous prendra pas par la main et vous devrez maîtriser chaque personnage disposant d’un style qui lui est propre.
Vous aurez également la possibilité de faire appel à une attaque de zone en quantité limitée et à débloquer au fil de l’aventure. Ces animations propres à la série seront différentes selon les personnages.
Toute la composante de ce type de jeu repose dans la maîtrise de votre personnage. Car vous n’aurez de cesse d’enchaîner vague après vague des ennemis toujours plus coriaces et nombreux.
Autant être clair tout de suite, même si le titre propose différents niveaux de difficulté, il ne vous laissera que peu de répit. Si il s’avère simple à prendre en main (quelques boutons seulement), il vous faudra des heures pour apprendre et anticiper les patterns des ennemis (coups et déplacements).
Sachez que vous aurez, tout comme dans les épisodes précédents, la possibilité de ramasser différentes armes ou bien de désarmer vos adversaires. Chaque arme ainsi récupérée disposera d’attaques qui lui sont propre et pourra être lancée.
Au fil du temps, vous apprendrez les différents combos réalisables et sachez que le jeu vous récompensera pour votre technicité au combat, vous poussant à enchaîner sans le moindre répit – passant d’un marasme globale à une frénésie de coups dignes d’un enchaînement chorégraphique.
Si la tâche peut paraître rébarbative à une époque où beaucoup de jeux nous prennent par la main, la récompense n’en est que plus grande.
La sensation réelle de maîtriser et de se battre pour améliorer encore et toujours son score. Tel le jeu de Go, Streets of Rage 4 ne vous demandera que quelques minutes pour être jouable, mais il vous demandera des heures pour le dompter.
Vous pourrez parcourir toute l’aventure seul ou jusqu’à quatre joueurs en local ou bien à deux en ligne.
La BD dont vous êtes le héros
Les quelques images d’illustration tout au long de l’article ne vous mentent pas, le jeu est beau, très beau même.
Soyons francs, si le style BD en 2D vous rebute, passez votre chemin.
En revanche, si vous avez la fibre artistique ou que vous êtes sensible au genre, c’est un régal de chaque instant !
L’ensemble du jeu, dessiné à la main, semble tout droit sorti d’une bande dessinée et le moindre élément, qu’il soit sur votre route ou en arrière plan a fait le soin d’un détail incroyable.
Ainsi, la moindre canette ou le moindre feu de poubelle est animé à la perfection. Il est presque dommage de ne pouvoir s’attarder par moment sur les différents plans offerts tant ces derniers regorgent de détails.
Que ce soit en mode portable ou docké, le jeu affiche un taux de rafraîchissement à 60 images par seconde constant, quelle que soit l’action ou le nombre d’ennemis présents à l’écran.
Les rares animations en dehors des combats servant l’histoire seront relativement statiques mais embelliront l’ambiance bande dessinée globale – donnant l’impression de parcourir des cases de BD en toute fluidité.
Niveau rendu, le design est lui aussi soigné comme jamais. Reprenant tous les codes de la série, il parvient à moderniser tout en rendant hommage au matériau d’origine. Ainsi, chaque personnage dispose d’un style qui lui est propre.
En plus des quatre personnages de départ, vous constaterez que tout un panel de combattants est à débloquer (nous y reviendront) dont certains dans un style pixel art parfaitement maîtrisé.
T’en as pour ton pognon mon loulou !
L’hommage au beat-them-all est indéniable. Vous ne serez pas sans savoir que le genre se veut court. Pensé à l’origine pour les machines d’arcade avides de vos précieuses pièces, les sessions de jeu n’excédaient que trop rarement la demi-heure. Alors, Streets of Rage 4 a-t-il écopé des fardeaux de ses ancêtres ? Que nenni !
Si l’aventure principale se boucle en quelques 12 stages, un simple tour du mode aventure vous ferait passer à côté de toute l’âme du titre. Alors oui, vous finirez le titre en une petite poignée d’heures mais sachez que vous devrez le recommencer encore et encore jusqu’à le maîtriser.
Car si boucler l’aventure en mode facile ou normal sera une promenade de santé, je vous mets au défi d’en faire de même en mode difficile ou pire, en mode mania pour les plus téméraires.
Une note vous sera attribuée à la fin de chaque stage et vous classera mondialement et entre potes, vous poussant à rechercher le sacro-saint rang S.
Différents modes de jeu feront également leur apparition une fois l’aventure bouclée une première fois.
Ainsi le mode arcade, héritage de l’ancienne époque, vous demandera de parcourir la totalité des 12 stages d’affilée avec un seul et unique crédit.
Le mode combat de boss vous opposera à tous les boss de l’aventure à la suite et ce, avec une et une seule vie. Un challenge qui va vous faire manger votre joystick !
Enfin, un mode Duel vous livrera à des combats en PvP en un contre un, en seul contre tous en équipe sur 8 arènes différentes.
Vous en voulez encore ?
Tout au long du jeu, vous pourrez débloquer un total de 17 personnages, oui 17 – comprenant des versions rétro des personnages des précédents épisodes en grande majorité, ils disposent tous d’un style qui leur est propre. Rallongeant encore une durée de vie faramineuse.
Toujours pas rassasié ? Bougre que vous êtes !
Des galeries d’images, des stages rétro, des bandes sons des deux premiers épisodes et bien d’autres trésors cachés sont à découvrir.
Tu vas monter le son oui ou mer#@!& ?
Dans la saga des Streets of Rage, la musique a toujours été un élément fondamental.
Connaissant des sorties sur de nombreux supports et même de nombreux remix, la bande son de Streets of Rage est une composante de son ADN.
Des concerts des titres des précédents opus ont même eux lieux encore récemment pour vous dire.
Alors, Dotemu a-t-il su reprendre le flambeau sur ce point également ?
Enfilez vos casques, faites chauffer amplis et dépoussiérez vos enceintes, on va faire péter les watts !
Avec une dream team à la composition de la bande son, ce Streets of Rage 4 nous présente un accompagnement sonore quasi sans faute.
Vous retrouverez ainsi le travail de Yūzō Koshiro, Olivier Derivière, Groundislava, XL Middleton, Keiji Yamagishi, Harumi Fujita, Motohiro Kawashima, Yoko Shimomura, Scattle ou encore Das Mortal.
Et toute cette pléthore de compositeurs n’a pas fait le déplacement pour aller cueillir des fraises.
Chaque thème a fait l’attention d’un détail particulier et nul doute que de nombreuses pistes vont trouver leur place au sein des classiques de la saga !
En marge de la bande son, il faut également noter que le sound design est lui aussi excellent – avec des sons distincts et de qualité pour chaque coup, chaque arme,…
Joué à la manette, en docké, en chill dans le canapé, dans mon lit, sur les toilettes, au stick arcade, à la manette, de jour et de nuit, le son à fond et/ou le casque vissé sur les oreilles. Seul, en ligne, à deux sur un canapé, les mains grasses de pizzas bien trop fromagères.
Les images sont issues du press-kit officiel. Sans le moindre doute, j’y jouerais encore dans 10 ans tout comme ses prédécesseurs qui n’ont jamais quittés ma ludothèque.
Fruit d’un pari fou, imaginez donc, une « petite » équipe française donner suite à un pilier du Beat-em-all des années 90.
Une des licence phare de SEGA !
Sur le papier, le pari semblait irréalisable et pourtant, avec travail et acharnement, nous voilà en 2020 avec la suite dont nous avions tous rêvé durant tant d’années.
Les superlatifs ne manquent pas et si aujourd’hui encore il nous arrive de rejouer avec nostalgie aux trois premiers opus, nul doute que cet épisode fera parler de lui des années durant. Avec un contenu dantesque, une rejouabilité quasi-infinie, il y a fort à parier que ce Streets of Rage 4 va vous occuper pendant un très très long moment... voire même de nombreuses années au même titre que ses aînés.
Comme je disais en introduction, après 20 années de tests, je me vois dans l’obligation de lui attribuer la note maximale car, même si l’on est pas amateur du genre, la qualité de travail, l’amour du genre ou encore la volonté de satisfaire ses fans est à son sommet. Alors, c’était mieux avant ? Non ! c’est mieux maintenant !