La saga des Zelda a rarement été aussi populaire depuis l’épisode de Breath of the Wild, sorti en 2017.
Sachant renouveler une formule restée presque inchangée durant des décennies, il a su mettre en accord les fans les plus sceptiques, mais aussi les plus réticents.
Deux ans plus tard et pour aider les plus impatients à attendre une hypothétique suite de ce Breath of the Wild, Nintendo sort un remake de la première déclinaison Game Boy de sa saga phare. Jouant sur la fibre nostalgique des joueurs, qu’en est-il vraiment ?
Une origine improbable, un statut de chef d’œuvre
Fort d’une conception entourée d’une aura légendaire, le titre original aura marqué toute une génération de fans. Que ce soit le support choisi ou l’équipe de développement de l’époque, tout ou presque aurait pu mener à l’échec.
Mais armé d’une motivation et d’un perfectionnisme à toute épreuve, Takashi Tezuka, alors réalisateur, saura relever nombre de défis tout en réunissant un nombre incroyable de talents.
Il s’entoure entre autre de Kensuke Tanabe au scénario, Shigeru Miyamoto en renfort pour les tests et la supervision de la seconde moitié du jeu, Minako Hamano et Kozue Ishikawa aux musiques (qui pousseront le Game Boy dans ses derniers retranchements avec des mélodies devenues inoubliables), sans oublier Kazumi Totaka au sound-design (qui ne manquera pas de cacher sa mélodie fétiche comme à son habitude).
La liste des collaborateurs est bien entendue non exhaustive mais sachez que pour un jeu Game Boy, le casting était des plus impressionnant.
Devenu un titre phare de la saga Zelda, au même titre d’un opus de console de salon, Link’s Awakening est même considéré par de nombreux fans comme le meilleur volet de la licence.
26 ans plus tard, nous voilà fins prêts à retourner sur l’île Cocolint pour revoir Marine, Tarkin, le village des animaux et bien entendu, réveiller le Poisson-Rêve.
Le rêve d’une île lointaine
Après des voyages en terres inconnues, Link est sur le chemin du retour vers Hyrule quand son bateau est frappé par la foudre. Recueilli par Marine sur la plage de l’île de Cocolint où il a fait naufrage, Link ne tarde pas à récupérer son épée et son bouclier avant de comprendre que si il veut repartir, une nouvelle quête attend le héros Hylien.
Si le pitch peut sembler désuet aujourd’hui, il faut noter que pendant de nombreuses années, Link’s Awakening a été le seul volet de la saga à ne pas se dérouler au royaume d’Hyrule. Il vous place dans une quête visant à organiser votre échappatoire, car il n’est pas si simple de repartir de l’île de Cocolint.
En effet, vous comprendrez très tôt dans l’aventure que pour repartir de l’île où vous vous êtes échoué, il va vous falloir réunir huit instruments de musique magiques pour tenter de réveiller un mystérieux poisson-rêve.
Ne vous laissez pas avoir par la relative simplicité du scénario, ce serait passer à côté de toute une ambiance, de tout un parfum.
Une ode à l’onirisme
La première chose qui vous frappera à n’en pas douter, est le design adopté par le jeu.
Si le précédent opus avait fait le choix d’un rendu en Cel-Shading (procédé de rendu proche d’un dessin animé), nous voilà face à un design rondouillard proche d’un style Chibi (comprendre, des personnages avec de petites jambes, de petits bras et une grosse tête) et à un rendu plastique proche du jouet.
Bien qu’ayant fait couler beaucoup d’encre à l’époque, force est de constater que le rendu est des plus réussi, cohérent et agréable.
Que ce soit les choix propres aux protagonistes ou aux monstres, sans oublier les décors, le style global est une ode à l’onirisme, nous mettant face à de vrais dioramas tels que nous aurions pu en rêver sur nos étagères.
Si le nombre et la qualité des effets visuels n’en fera pas un mètre-étalon en terme de rendu graphique, à l’heure où des titres comme Astal Chain ou Dragon Quest 11 ont su rappeler que la console hybride de Nintendo en avait sous le capot, le rendu du jeu flatte la rétine du début à fin du titre – à l’inverse du framerate qui va se révéler être LE gros point noir du titre.
Car si je ne manquerais pas d’éloges face au design mignon et rêveur du titre, l’animation va se révéler problématique.
Douche froide. Passé l’émerveillement et l’excitation de revoir Marine, Tarkin et tout l’univers de ce Link’s Awakening, nous voilà face à des chutes de framerate régulières et totalement injustifiées.
Ce ne sont pas les quelques ennemis à l’écran ou les effets qui pourront justifier une telle irrégularité dans la fluidité du titre. Il est à souhaiter que Nintendo publie au plus vite un patch correctif car en l’état, il nous est difficile de rester immergé dans l’onirisme enchanteur du titre, sorti de notre rêve à grands renforts de ralentissements.
Le plus frustrant étant que ces ralentissements ne sont pas non plus « violents », il aurait suffit de bloquer le rafraichissement à 30 images par secondes pour augmenter considérablement le confort de jeu.
Range ton Game Boy, j’ai mes joy-cons !
Forcément, la seconde chose qui vous interpellera sera la maniabilité. Manettes en mains, que ce soit aux joy-cons comme à la manette Pro, tout répond parfaitement.
Si le titre adopte fatalement une jouabilité « à l’ancienne » induite par une vue de dessus, nous constaterons que de nombreuses améliorations ont (heureusement) vues le jour.
Pour rappel, le titre original n’offrait que les boutons A et B du Game Boy comme raccourcis pour les éléments de votre inventaire. Ici vous aurez une touche assignée à votre épée, une autre à votre bouclier et une énième aux bottes de pégase.
Une fois ces dernières obtenues, enfin, il vous restera deux autres touches où vous pourrez assigner au choix deux objets de votre inventaire.
Dans l’ensemble, aucun soucis de maniabilité ne sera à noter hormis quelques menus flottements dans les sauts lors des phases en vue de côté.
C’était mieux avant ?
Qui dit remake, dit forcément mécaniques de jeu old-school. Ainsi, si le dernier Zelda avait quelque peu bousculé la logique des donjons propre à la série, ce remake nous replonge dans l’ancienne formule.
C’est donc huit donjons classiques auxquels s’ajoute un donjon final qui vous attendent. Si la formule se veut déjà-vu, il ne faut pas oublier que l’original fait partie de ces jeux qui ont posé les bases de cette « logique des donjons ».
Et si à l’époque, les mécaniques des donjons étaient quasiment irréprochables, force est de constater qu’aujourd’hui et ce, malgré une relative facilité, ils conservent leurs nombreuses qualités.
En revanche, là où ces donjons impressionnaient sur Game Boy il y a plus de 25 ans, aujourd’hui, confortablement installé dans votre canapé, il y a fort à parier que vous n’en ferez qu’une bouchée – le titre ne faisait pas preuve de grande difficulté.
Mais ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain ! Car les qualités des donjons sont toujours présentes et le génie du level-design fait toujours mouche. Pour celles et ceux qui ont fait le jeu il y a un quart de siècle (ouïe!), vous retrouverez avec bonheur la foule de bonnes idées déjà présentes à l’époque. Pour les plus jeunes, nul doute que l’exploration se fera avec le plus grand plaisir.
À noter qu’un mode « difficile » est accessible immédiatement pour les plus téméraires.
Parmi les ajouts de ce remake, vous trouverez un nouveau donjon appelé « donjon mosaïque », prenant place là où se trouvait le donjon supplémentaire de la version DX sur Game Boy Color.
À chaque donjon principal terminé, vous débloquerez des pièces de donjons que vous pourrez assembler dans ce donjon mosaïque. Extrêmement simple à l’usage, vous composerez rapidement et très simplement vos premiers donjons.
Autant être honnête de suite, vous ne trouverez pas là un Zelda-Maker mais une simple feature rallongeant un tant soit peu la durée de vie du titre. Durée de vie allongée par quelques quêtes secondaires dont certaines ajoutées ou agrémentées de quelques surprises mais je n’en dirais pas plus.
Chante Marine, chante !
Comme évoqué dans l’introduction, la musique de l’œuvre originale, composée par Minako Hamano et Kozue Ishikawa, était démente pour l’époque et surtout pour le support. Nintendo n’avait ainsi pas le droit de gâcher une telle pépite.
Et sur ce point, je ne peux faire que des éloges.
Chaque thème, chaque son, chaque mélodie a fait l’objet d’une attention particulière.
Nous retrouverons bien évidemment le thème du poisson-rêve revisité dans une version frôlant la perfection. Les thèmes des donjons sont ainsi exquisement revisités et pour les nostalgiques de l’opus original, nul doute que ces reprises vous arracheront moult sourires. Je ne vous gâcherais pas la surprise mais le thème de fin vous arrachera à coup sûr une larme de bonheur.
Collecte Or ?
Petit encart à propos de l’édition collector de ce Zelda.
Si le précédent opus nous avait gratifié d’une édition comportant l’épée de légende dans son socle, là nous nous retrouvons face à un simple artbook de taille correcte mais pas exceptionnelle et surtout un steelbook aux couleurs du Game Boy.
Certes ce dernier est de toute beauté et charmera au premier coup d’oeil le joueur nostalgique. Mais là où le bât blesse, c’est quand il s’agit de passer à la caisse. Le jeu étant trouvable pour moins de 50 euros, la facture d’une centaine d’euros pour un petit artbook et un steelbook d’euros peine à se justifier.